Des inconnus, partout autour de lui, il n’a connu que cela, des femmes et des hommes au visage semblable qu’il n’arrivait jamais à différencier du premier regard. Son propre visage, il lui était difficile de le reconnaitre directement sur une photo, il avait toujours besoin de concentration. Pourtant, cela lui avait paru normal au début, pensant que tout le monde était comme lui. Des yeux, un nez et une bouche, il n’y avait rien de plus commun. Comment pouvez-t-il se baser sur ces simples critères ? Il fallait entendre une voix, sentir un parfum ou voir des vêtements familiers pour savoir à qui il avait à faire. C’est ainsi que Yohan passa les premières années de sa vie, dans le brouillard le plus complet. Prosopagnosie, ce n’est qu’à ses dix ans que le diagnostic fut révélé. Il était anormal. Ce qu’il pensait être commun chez tout le monde, ne l’était que pour lui. Yohan en ressenti longtemps un mal être qu’il tentait de cacher.
Enfance oisive et benjamin d’une famille nombreuse, il ne manqua jamais de rien. Sa famille était excessivement fortunée, de quoi les préserver largement du besoin pour plusieurs vies. Yohan n’avait donc jamais eu de soucis à se faire pour son avenir. Etant le plus jeune, il n’avait pas à penser à la relève de la famille, d’autres s’en occupaient déjà, et pouvait se permettre de choisir le chemin qui l’attirerait le plus. C’était peut-être un peu cela le problème aussi. Il n’y avait jamais rien qui l’intéressait réellement…ou du moins, jamais assez longtemps. Las, Yohan l’avait toujours été.