Un coup d’œil à ma montre et un autre soupir s’échappait de mes lèvres. J’avais l’impression d’être un lion en cage, tournant encore et encore dans notre minuscule appartement dans l’attente d’entendre la porte s’ouvrir et ta voix se répercuter dans l’entrée. Mais rien. J’étais persuader que tu devais rentrer il y a de ça trois heures, c’était ce que tu m’avais dit ce matin avant d’aller en cours. Un autre coup d’œil à ma montre, deux minutes de passé…

Je m’allongeais dans le canapé, les mains sur le visage en tentant de me calmer. J’inspirais et expirais encore et encore l’air de l’appartement mais rien n’y faisait, cette envie de tout balancer était plus forte que moi. D’ailleurs il n’y avait pas des coussins initialement sur ce canapé ? Je me redressais et les cherchais des yeux avant de me souvenir que dans un élan de colère je les avais jeté dans la pièce il y a de cela une heure. Une heure seulement… J’avais l’impression que ça faisait une éternité que je l’avais fait… Encore un œil à ma montre, cinq minutes de passée.

Mon cerveau tournait à plein régime, mon souffle était court et mes mains tremblaient. Je savais que je devais me contrôler, mais je ne savais pas si en te voyant rentré j’allais réussir à le faire. Et plutôt que de défouler mes nerfs sur toi le moment venu, je donnais un coup de pied dans la table basse, faisant tomber le vase en verre qui s’y trouvait et bouger les autres objets qui était dessus. Le sol était d’un seul coup recouvert d’eau et de morceau de verre mais je m’en fichais, je voulais seulement te voir, te prendre dans mes bras, te serrer de toutes mes forces dans mes bras et enfin savoir pourquoi tu étais autant en retard.

Encore une fois je tentais de t’appeler en vain. Toujours cette même voix féminine qui répétait cette phrase trop entendu ces trois dernières heures : « votre correspondant est temporairement indisponible, vous pouvez laisser un message après le signal sonore ». Si seulement tu avais écouté ou lu mes messages…  Je m’enfonçais dans le canapé, imaginant les pires scénarios avant de fermer les yeux et de laisser ma tête tombée en arrière. Par pitié, faites que tu reviennes vite avant que notre appartement ne se transforme en champ de bataille…

Alors que je commençais à désespérer, cette voix joyeuse comme à son habitude, celle qui allait enfin me sortir de cet état se faisait entendre. Mais très rapidement la joie que je pouvais percevoir dedans s’était transformée en énervement. Je ne comprenais pas sur le coup avant qu’il ne parle du bazar de notre appartement. Mais je n’étais pas en état de sympathiser ou de me sentir mal d’avoir réduit tout son travail de la veille à zéro, non, à la place je me levais rapidement du canapé pour aller le voir, ne faisant pas attention aux bout de verre par terre. Et contrairement à ce que mon état pouvait laisser penser je me contentais de le prendre dans mes bras, le serrant aussi fort que possible contre moi sans me soucier de l’écraser ou de lui faire mal. J’enfouissais mon visage contre son cou, fermant les yeux alors que mon cœur se calmait peu à peu. Son parfum était le même que d’habitude et ça peut sembler bizarre dit comme ça, mais j’avais la sensation d’être un drogué qui venait enfin d’avoir sa dose. ‘Tu m’as manqué’, c’était ce que je voulais te faire comprendre à travers ce geste mais comme à mon habitude je ne disais rien de ce genre…

« Pourquoi t’es en retard ? T’étais où ? Avec qui ? Pourquoi tu répondais pas ? Pourquoi tu m’a pas prévenu ? Je le connais ?»

Une série de question débitée à un rythme maladivement rapide mais qui attendait toutes des réponses pour définitivement me calmer. Enfin sauf s’il décidait encore de raconter n’importe quoi juste pour rigoler et que de mon côté je le prenais sérieusement et m’énervait. Il l’a déjà fait et ça ne m’étonnerait pas qu’il puisse le refaire, et moi, idiot possessif et amoureux que je suis, je tomberais dans le panneau… Et voilà comment on repartirait sur une dispute complètement inutile et vide de sens.

Je le lâchais quand il s’éloignait et attendais sa réponse, quelque peu impatient de savoir pour mon copain m’avait fait silence radio toute une journée. Mais d’un coup mon cœur s’arrêtait, se serrait et me faisait horriblement mal. Pourtant son parfum était le même que d’habitude quand il est rentré. Subitement, tout un tas de suppositions me venait en tête, toutes plus folles les unes que les autres. Avait-il pris son parfum pour le mettre avant de rentré ? Non il sentirait plus fort que ça... Alors son amant à le même parfum ? Pourquoi est-ce qu’il marche normalement s’il a passé sa soirée à baiser avec lui ? C’est lui qui était dominant ? Pourtant j’ai cru comprendre qu’il préférait être dominé… Et pourquoi il n’est pas gêné de me le dire ? Il en a marre de moi alors il l’avoue ouvertement ? Et pis dans une ruelle ? S’il avait un amant il économiserait au moins pour un hôtel non ? A moins que l’argent que je lui donne, il l'a déjà… Oh putain non..

Mais en un fragment de seconde il cassait mes pensées et mes idées tordues  en me disant que c’était son travail. Je soufflais et me massais les tempes, le sentiment de devenir bipolaire grimpant de plus en plus. Mon cœur battait toujours trop rapidement dans ma cage thoracique malgré sa déclaration et le souvenir soudain de quand il m’a parlé hier de cette réunion.

« Pourquoi tu me fais ça… Tu sais très bien comment je suis putain… »

Un soupir s’échappait de mes lèvres avant que je m’appuie sur la table, continuant à me masser les tempes. Il n’était pas passé loin, une seconde de plus avec son mensonge et je pense que je l’aurais giflé. Je l’aurais regretté et aurais tout fait pour me faire pardonner par la suite mais ça aurait été plus fort que moi sur le moment. Comme à un drogué, personne ne doit me retirer Min Guk. Je ne donnais pas cher de la personne qui essayerait, peu importe de qui il s’agissait.

Son toucher, sa voix, sa simple présence ici avec moi suffisait à me rassurer. Il était là avec moi, c’était le principal, c’était tout ce que je voulais. Je comprenais subitement le pourquoi de son comportement, dans ce cas devrait-on économiser pour un punching-ball ? Au moins l’appartement ne risquerait plus de se retrouver dans cet état. Mes yeux se posaient sur le désordre que ma colère avait engendré, et étant revenu à moi-même, et était soulager que ça ne soit pas Min Guk qui ait subit tout ça.

Mes mains se posaient sur les siennes qui entouraient ma taille, un sourire esquissé sur mes lèvres. Je devrais le savoir qu’il blaguait en disant tout ça, depuis le temps qu’on était ensemble, jamais il ne me tromperait pas vrai ? Une fois libre de mes mouvements je me retournais face à lui, les traits plus détendu mais visiblement fatigués.

« Sauf que c’est drôle que pour toi ces blagues. »

Ma voix était toujours aussi froide, mes émotions ne se voyant pas à travers celle-ci. J’étais heureux en ce moment même et pourtant rien ne le laissait voir. Sauf peut-être mes yeux ? La seule partie de mon corps qui était capable de me trahir tellement elle était expressive. Avait-il appris à lire aux travers de ceux-ci ? Dans un sens j’espérais que oui, mais dans un autre non. Je ne voulais pas que quelqu’un puisse pénétrer dans mon esprit ou dans mon cœur aussi facilement. Mais si c'était lui ce quelqu'un alors il comprendrait à quel point je l'aimais, à quel point j'étais heureux avec lui et surtout à quel point il m'a manquer quand on se retrouve le soir après nos journées chargées.

« Y'a rien à manger, c'est la misère...... Et sinon je ne rigole pas, tu vas faire le ménage, je sais pas pourquoi tu as foutu autant le bordel mais c'est pas cool Kyung ! »

Mes yeux s’arrondissaient peu à peu, mes sourcils eux se soulevaient légèrement alors que mes lèvres lâchaient un bas « pardon ? ». Une chose qu’il n’avait visiblement pas compris : moi et le ménage c’était une harmonie qui n’existait que dans son esprit. C’était comme un chanteur de rock qui s’essayait sur du classique, comme un assassin qui tente de faire croire qu’il est innocent alors que ses empreintes sont partout, comme... Bon j’arrête les comparaisons. Je secouais la tête agitais un doigt en l’air, un sourire aux lèvres.

« Je ferais pas le ménage Min Guk… Compte pas sur moi pour ça… »

Quitte à réenclencher une guerre entre nous, à voir les voisins demain à la porte à cause du bruit tard le soir, à entendre le chien du dessus aboyer comme un fou après notre dispute : Jamais je ne ferais le ménage. Alors me voilà encore à tenter de négocier pour avoir ce que je voulais, toujours aussi têtu et dieu sait que lui aussi l’est…

« Tu fais le ménage, je fais la cuisine avec les restes et demain on va en course. Ça te va ? »